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La Présidente du Parlement européen
COMMUNIQUES DE PRESSE

Bruxelles, le 22 mai 2000

Discours de Mme Nicole FONTAINE, Présidente du Parlement européen

Introduction au débat - Réunion ministérielle C.I.G
 
Monsieur le Président du Conseil en exercice,
Monsieur le Président de la Commission,
Mesdames et Messieurs les Ministres,


Lors de notre dernière rencontre à Luxembourg, le 10 avril dernier, le vote sur le rapport DIMITRAKOPOULOS-LEINEN sur les propositions du Parlement européen dans la perspective de la CIG n'avait eu lieu qu'en commission des Affaires constitutionnelles.

3 jours après, le 13 avril 2000, la plénière du Parlement européen a confirmé ce vote dans ses principales lignes directrices.

S'agissant seulement de la composition de la Commission, la plénière a souhaité maintenir les deux options ouvertes (Commission restreinte - Commission élargie) et a notamment clarifié les positions du Parlement européen à propos de la Cour de Justice, thème principal de votre rencontre aujourd'hui.

Je souhaiterais souligner que la majorité relativement faible obtenue dans le vote final (238 pour, 147 contre et 73 abstentions) ne reflète absolument pas la détermination du Parlement européen sur les points clefs qui seront au cœur des négociations.

C'est ainsi que l'on constate que :
  • le choix d'une charte des droits fondamentaux ayant une véritable portée juridique a recueilli 341 voix favorables (84 contre, 45 abstentions)
  • le principe de limiter l'unanimité au Conseil aux seules questions de caractère constitutionnel (306 voix pour). Ainsi, les collègues ont souhaité majoritairement (259 voix) que les questions fiscales et sociales ne soient plus maintenues à l'unanimité
  • Enfin, la constitutionnalisation des Traités a recueilli 311 voix favorables (84 contre, 45 abstentions). Il s'agit, on le sait, d'une question qui semble avoir progressé au cours des derniers jours de façon positive. Je souhaiterais, que notre échange informel de ce matin, puisse aussi porter sur l'éventuel contenu d'une constitution et sur le fait de savoir si à Feira son inscription à l'ordre du jour de la CIG est désormais une perspective envisageable.
Pour revenir maintenant aux adaptations de toutes les Institutions et organes européens nécessaires à l'élargissement et s'agissant du Parlement européen, notre Institution a confirmé sa proposition, à partir de 2009, d'une clef de répartition proportionnelle corrigée par l'attribution minimale de 4 sièges par Etat. Nous en avions parlé à Luxembourg et je n'ai pas oublié, bien sûr, les réserves exprimées par Madame le Ministre du Luxembourg. Je dirais seulement à ce stade que, le sacrifice de 2 sièges pour le Luxembourg et les autres Etats de proportions comparables qui adhéreront à l'Union, serait un sacrifice partagé dans la mesure où la diminution du pourcentage en terme de proportion de chacun des actuels Etats Membres sera analogue à la diminution du pourcentage en terme de sièges. Mais le Parlement européen s'interroge sur l'intérêt de proposer, dès maintenant, des formules chiffrées et j'apprécierais, en outre, de connaître vos premières réactions sur notre proposition d'élire une partie des membres du Parlement européen dans le cadre d'une circonscription européenne unique en attribuant à chaque électeur deux suffrages, l'un au titre des listes nationales et l'autre au titre des listes européennes.

Dans le même ordre d'idée, la nécessité d'instituer un véritable statut des partis politiques européens est devenue impérieuse. Ceux-ci remplissent une fonction de plus en plus importante dans l'expression de la volonté politique des citoyens de l'Union et dans la formation d'une conscience européenne. Ils jouent également un rôle essentiel dans le processus législatif et de contrôle au sein de notre Institution. Cette institutionnalisation des partis politiques européens devrait prévoir les conditions de reconnaissance, le statut, les modalités de leur financement et du respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux.

Un point qui a été discuté, tout récemment, au niveau des réunions préparatoires concernant la hiérarchie des normes, a soulevé mon attention. Comme vous le savez, le Parlement européen a depuis longtemps appelé de ses vœux une hiérarchie des normes et il l'a à nouveau exprimé dans notre résolution du 13 avril. A mon avis, une hiérarchie équilibrée permettrait, en effet, aux institutions et aux co-législateurs d'exercer leurs responsabilités démocratiques, et d'élargir le champ d'application de la codécision sans alourdir le fonctionnement de l'Union.
Mais, le Parlement européen et les citoyens ne comprendraient pas que cette hiérarchie des normes limiterait le pouvoir de codécision aux seules grandes lignes directrices.

S'agissant maintenant des adaptations nécessaires aux autres Institutions, le Parlement européen suit avec intérêt les travaux du groupe des "Amis de la Présidence". Pour notre part, dans le souci de rendre la justice plus rapide et proche du citoyen et de rééquilibrer les droits de notre Institution, nous avons voté une série de propositions qui concerne la Cour de justice et le Tribunal de première instance.

A propos de la composition de la Cour, nous proposons un juge par Etat membre pour un mandat de 9 ans non renouvelable. La discussion est ouverte et les arguments des uns et des autres ne sont pas sans fondement, mais surtout nous souhaitons l'extension des compétences de la Cour de Justice. Ceci répond à plusieurs nécessités, notamment celle d'une protection juridictionnelle renforcée des droits fondamentaux.

Quelles seraient les meilleurs solutions à retenir, à votre avis ? Renforcer le Tribunal de Première Instance en élargissant sa compétence en matière de recours directs, ou pour connaître des questions préjudicielles et en encourageant la création de chambres spécialisées ? J'aimerais connaître l'état de votre réflexion.

Nous proposons que, lorsque le Conseil aura à statuer sur ces questions à l'avenir, il le fasse à la majorité qualifiée et avec l'avis conforme du Parlement. La même procédure d'avis conforme pour ce qui est de l'association du Parlement à la procédure de désignation des juges devrait être retenue. Certains avancent, nous le savons, un "risque de politisation", je crois que l'association du Parlement contribuerait plutôt à rapprocher la Cour des citoyens, en renforçant sa légitimité démocratique et en rendant la procédure plus transparente.

Je pense qu'un consensus pourrait se faire autour de certaines de ces propositions du Parlement européen et je vous remercie, le cas échéant, de me le confirmer.

Il est un autre aspect relatif à la Cour de Justice sur lequel je voudrais attirer votre attention.

La Cour est la seule Institution de l'Union qui n'a pas la maîtrise de son plan de charge. Celui-ci est défini par les recours qui lui sont adressés. Et ceux-ci sont en considérable augmentation. De ce fait, l'évolution des moyens qui sont affectés à la Cour ne peut pas se référer seulement au critère habituel d'évolution générale du budget communautaire.

C'est ce qui se passe actuellement et les conséquences en sont néfastes pour le citoyen. J'aimerais connaître votre réaction à cette réflexion.

Le renforcement de la protection des intérêts de l'Union contre la fraude constitue également un objectif nécessaire qu'il convient de poursuivre avec équilibre et proportionnalité. Le Parlement propose l'instauration d'un Procureur européen indépendant ainsi qu'une modification de l'article 280 du Traité. Ces propositions doivent s'apprécier en synergie avec celles concernant la Cour des Comptes.

S'agissant du Comité des Régions et du Comité économique et social, le Parlement européen attache un grand intérêt au bon fonctionnement et au rôle de ces Institutions qui représentent opportunément diverses formes de la société civile et des pouvoirs locaux et régionaux. Les dispositions que nous avons voté vont dans cette direction.

Je souhaite enfin, pour terminer, vous redire l'importance que nous attachons au bon aboutissement du Statut du député européen et donc à la nécessité, s'il le faut, de modifier le traité, et vous faire part de ma préoccupation et connaître vos sentiments au sujet de l'extension du vote à la majorité qualifiée. Le Parlement européen est inquiet de la faiblesse actuelle des avancées dans ce domaine, lequel est, comme certains d'entre vous l'aviez rappelé le 10 avril, l'un des points clefs de la C.I.G.

Je suis convaincue que la Conférence Intergouvernementale n'imagine pas que les coopérations renforcées - qui permettront à un groupe d'Etats d'aller de l'avant, et le Parlement européen souhaite leur accomplissement - seront le remède miracle susceptible de résoudre les situations bloquées par le manque d'accord sur la majorité qualifiée. Pour nous les progrès sur ces deux "fronts" sont indissociables.

Dans certains domaines, en effet, l'application des coopérations renforcées sera très difficile, voire même impossible comme pour le Marché intérieur où toute coopération renforcée dans le domaine législatif pourrait créer des détournements de concurrence. La question est complexe et j'apprécierais de connaître, à ce stade, les réflexions des Ministres.

 
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